En cas d’impossibilité de consentir à un acte médical
La loi clarifie les modalités d’information des membres de la famille potentiellement concernés dans les situations où la personne n’est pas en mesure d’informer elle-même ses proches de ses désirs en matière médicale ou d’autoriser le médecin à réaliser un acte médical.
En outre, il est désormais prévu que lorsqu’une personne est hors d’état d’exprimer sa volonté ou lorsqu’elle est décédée, un examen de génétique peut être entrepris à des fins médicales dans l’intérêt des membres de sa famille potentiellement concernés, dès lors qu’un médecin suspecte une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins.
Lorsque la personne est décédée, l’examen est réalisé à partir d’échantillons de cette personne déjà conservés ou prélevés dans le cadre d’une autopsie à des fins médicales.
La naissance secrète et l’anomalie génétique
La loi crée un cadre juridique pour permettre la transmission, sans rupture du secret, d’une information médicale d’ordre génétique du parent de naissance à la personne née dans le secret, et inversement, en cas de diagnostic, chez l’un ou chez l’autre, d’une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins.
Pour garantir le secret médical, l’information détaillée sur l’anomalie génétique en cause et, le cas échéant, les risques associés ne peuvent transiter que de médecin à médecin. Les médecins du parent de naissance et de l’enfant né dans le secret doivent par conséquent être mis en relation sans rupture du secret de l’accouchement. Cette mise en relation nécessite un intermédiaire tenu au secret professionnel : il s’agit du Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP).
L’examen génétique
Le consentement à un examen de génétique et la possibilité de refuser la révélation de ses résultats sont modifiés.
Ainsi, les informations à fournir au patient, préalablement au recueil de son consentement doivent désormais aussi porter :
- sur la possibilité que l’examen révèle incidemment des caractéristiques génétiques sans relation avec son indication initiale ou avec son objectif initial mais dont la connaissance permettrait à la personne ou aux membres de sa famille de bénéficier de mesures de prévention, y compris de conseil en génétique ou de soins ;
- sur la possibilité de refuser la révélation des résultats de l’examen de caractéristiques génétiques sans relation avec l’indication initiale ou l’objectif initial de l’examen ainsi que des risques qu’un refus ferait courir aux membres de sa famille potentiellement concernés, dans le cas où une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins serait diagnostiquée
A la suite de la transmission de ces informations, le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit, préalablement à la réalisation de l’examen. Ce consentement doit mentionner l’indication ou l’objectif de l’examen.
En outre, le consentement est révocable en tout ou partie, sans forme et à tout moment.
Enfin, les tests génétiques dits « récréatifs » ne peuvent désormais plus faire l’objet de publicité (pour rappel, il s’agit de tests génétiques sans ordonnance médicale, injonction judiciaire ou projet de recherche strictement défini).
L’algorithme en médecine
Le principe d’une garantie humaine est consacré. Concrètement, il est désormais prévu que lorsqu’un algorithme d’aide à la décision à visée préventive, diagnostique ou thérapeutique est utilisé, les résultats sont rendus au patient par un professionnel de santé, qui l’informe de l’utilisation de cet algorithme et de ses modalités d’action.
Les professionnels de santé sont informés du recours à ce traitement de données. Les données du patient utilisées dans ce traitement et les résultats qui en sont issus leur sont accessibles.
Par ailleurs, les concepteurs d’un traitement algorithmique doivent s’assurer de l’explicabilité de son fonctionnement pour les utilisateurs.
Limiter la dérive neurodéterministe
La loi comporte une mesure pour mieux protéger les personnes contre des interprétations contestables de leurs images cérébrales et notamment le détournement ou la surinterprétation des usages de cette technique à des fins judiciaires.
Ainsi, il est désormais expressément prévu que les techniques d’imagerie cérébrale ne peuvent être employées qu’à des fins médicales ou de recherche scientifique ou dans le cadre d’expertises judiciaires, à l’exclusion, dans ce cadre, de l’imagerie cérébrale fonctionnelle.
La neuro-modulation
Depuis des années, des techniques de modification du fonctionnement cérébral, dites techniques « neuro-modulatrices » se sont développées.
Certaines sont anciennes, comme les médicaments (psychostimulants, anxiolytiques etc.), et d’autres plus récentes, qu’il s’agisse de dispositifs médicaux destinés à la stimulation transcrânienne au moyen de courants électriques, magnétiques ou électromagnétiques ou à la stimulation cérébrale profonde, ou qu’il s’agisse de thérapies cellulaires pour lutter par exemple contre des maladies neurodégénératives, comme la maladie de Parkinson.
Ces pratiques ne sont pas encadrées par la loi. Pour y remédier, il est désormais expressément prévu que certains de ces actes peuvent être interdits par décret, après avis de la Haute Autorité de santé.
La recherche génétique
La loi assouplit les conditions dans lesquelles des recherches recourant à des examens génétiques peuvent être réalisées à partir d’échantillons biologiques prélevés initialement à d’autres fins, en posant le principe d’un consentement implicite de la personne prélevée à l’utilisation du prélèvement dans le cadre d’un programme de recherche.
En cas de découverte de caractéristiques génétiques pouvant être responsables d’une affection justifiant des mesures de prévention ou de soins au bénéfice de la personne ou de membres de sa famille potentiellement concernés, la personne en est informée, sauf si elle s’y est préalablement opposée.
Un décret doit préciser cette mesure.
L’interruption médicale de grossesse
La proposition systématique à la femme d’un délai de réflexion d’au moins 1 semaine en cas d’interruption médicale de grossesse (IMG) pour motif fœtal est désormais supprimée.
En outre, les pratiques de réductions embryonnaires ou fœtales susceptibles d’être envisagées en cas de grossesse multiple sont modifiées afin de réduire les risques associés aux grossesses multiples pour la santé maternelle, embryonnaire ou fœtale.
Désormais, la réduction embryonnaire ou fœtale ne peut intervenir qu’avant la fin de la 12e semaine de grossesse et qu’à la condition que 2 médecins, membres d’une équipe pluridisciplinaire, aient préalablement attesté que les conditions médicales, notamment obstétricales et psychologiques sont réunies. Une réduction embryonnaire ou fœtale ne peut être entreprise sur la base d’aucun critère relatif aux caractéristiques des embryons ou des fœtus, y compris leur sexe.
Les conditions d’IVG pour une mineure
Les conditions d’interruption de grossesse pour une mineure sont clarifiées : il est désormais expressément prévu l’accueil et la prise en charge de la femme mineure qui relève d’une interruption de grossesse pour motif médical et qui souhaite garder le secret à l’égard de ses parents.
Les enfants avec variation du développement génital
La loi consacre le principe selon lequel les enfants présentant une variation du développement génital sont systématiquement orientés vers les centres de référence des maladies rares du développement génital, afin qu’ils puissent être pris en charge après concertation d’équipes pluridisciplinaires spécialisées.
La greffe de tissu germinal
La loi autorise désormais la conservation de gamètes ou tissus germinaux pour motif pathologique pour rétablir une fonction hormonale.
Le conseiller en génétique
Pour rappel, le conseiller en génétique intervient sur prescription médicale et sous la responsabilité d’un médecin qualifié en génétique, pour délivrer des informations, donner des conseils et prendre en charge les personnes et leur famille confrontées à la réalisation d’un examen de génétique ou au résultat d’un tel examen
Dans un contexte d’augmentation de l’activité de génétique moléculaire en France, les conseillers en génétiques ont désormais la possibilité de prescrire certains examens de génétique.
Cette mesure sera précisée par un décret à venir.
L’examen de biologie médicale
Pour rappel, un examen de biologie médicale se décompose en 3 phases, à savoir :
- la phase pré-analytique, qui comprend le prélèvement d’un échantillon biologique sur un être humain, le recueil des éléments cliniques pertinents, la préparation, le transport et la conservation de l’échantillon biologique jusqu’à l’endroit où il est analysé
- la phase analytique, qui est le processus technique permettant l’obtention d’un résultat d’analyse biologique
- la phase post-analytique, qui comprend la validation, l’interprétation contextuelle du résultat ainsi que la communication appropriée du résultat au prescripteur et au patient
Il est désormais possible que les laboratoires, sur autorisation des agences régionales de santé, transmettent directement les résultats de l’examen génétique à son prescripteur (médecin ou sage-femme, seuls habilités à restituer ces résultats au patient).
La nouvelle réglementation prévoit aussi que le résultat d’un examen de biologie médicale de diagnostic prénatal puisse être restitué à la femme enceinte par le prescripteur de l’examen.
L’examen génétique somatique
La loi distingue désormais les examens des caractéristiques génétiques constitutionnelles des examens de génétique somatique en lui créant une définition propre.
Elle définit ainsi l’examen des caractéristiques génétiques constitutionnelles comme consistant « à analyser les caractéristiques génétiques d’une personne héritées ou acquises à un stade précoce du développement prénatal ».
L’objectif de cette définition et des garanties accordés à cet examen est d’assurer une prise en charge protectrice des personnes confrontées à des examens de génétique somatique (dans le domaine de l’oncologie en particulier).
Le microbiote fécal
La transplantation de microbiote fécal consiste à introduire des selles d’un ou de plusieurs donneurs sains dans le tube digestif d’un patient receveur afin de rééquilibrer la flore intestinale altérée de ce dernier.
La loi encadre désormais le recueil de selles d’origine humaine destinées à une utilisation thérapeutique, articulé autour d’une déclaration à l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) de toute activité de collecte de selles destinées à la préparation de microbiote fécal à des fins thérapeutiques.
Le directeur général de l’ANSM doit également définir des règles de bonnes pratiques auxquelles vont être soumises les opérations de collecte, de contrôle, de conservation, de traçabilité et de transport des selles effectuées par les organismes déclarant des activités de collecte de selles.
L’ANSM pourra suspendre ou interdire les activités de collecte de selles menées par des organismes qui méconnaîtraient leurs obligations légales.
Les innovations thérapeutiques
La réalisation de médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le cadre d’une seule intervention médicale est désormais autorisée. Elle se fait sous la responsabilité d’un établissement ou organisme autorisé.
Cela permet ainsi d’éviter des actes inutiles et potentiellement néfastes pour la santé des patients (anesthésie), tout en permettant la diffusion de nouvelles innovations thérapeutiques.
Source : Loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique
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